Jean-Luc Mélenchon (Front de Gauche) Jean-Luc Mélenchon (Front de Gauche)
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PRIORITÉS
En cas de victoire de votre parti, quelles sont les trois mesures que vous prendrez pour le secteur agricole ?
L'actuel modèle agricole ne répond pas aux intérêts de la majorité des paysans, dont les revenus et l'avenir sont hypothéqués. Le Front de Gauche engagera des réformes significatives en faveur d'une agriculture paysanne, écologique, relocalisée créatrice d'emploi et de revenus, afin de garantir l'intérêt général et maintenir des campagnes vivantes (voir www.placeaupeuple2012.fr/agriculture). Nous défendrons des propositions auprès de nos partenaires européens, mais nous agirons aussi au niveau national, en remettant en cause chaque fois que nécessaire les directives européennes sur la concurrence libre et non faussée. Ainsi, dans le cadre du vaste plan national de transition écologique de l'agriculture qui sera initié en début de mandature :
- nous garantirons le droit au revenu, en appliquant pour un certain nombre de produits agricoles distribués sur le territoire national, le principe d'un prix minimal au producteur et d'un coefficient multiplicateur maximal ;
- dans l'objectif de recréer 300.000 emplois agricoles en cinq ans, l'Etat renforcera son rôle d'arbitre au sein des Safer et du contrôle des structures et fera appliquer le principe d'une surface maximale d'exploitation par actif : au-delà de ce seuil, les terres libérées serviront à l'installation et à l'agrandissement des petites exploitations ;
- parce que l'agriculture est une question prioritaire de société, nous instaurerons du pluralisme syndical dans les interprofessions, et, de plus, l'ouverture aux collectivités et associations dans la gouvernance des chambres d'agriculture et Safer.
ENVIRONNEMENT
Faut-il encore verdir la politique agricole et si oui, de quelle façon ?
Nous ne parlons pas de verdissement : nous parlons d'une bifurcation du modèle agricole vers une agriculture écologique, paysanne et créatrice d'emplois. Il en va de l'intérêt général, car le modèle agricole détruit la biodiversité, contamine l'environnement et contribue à l'épuisement des ressources et au réchauffement climatique. Il en va aussi de l'intérêt de la grande majorité des agriculteurs, engagés dans un modèle productiviste qui détruira encore les trois quarts des exploitations d'ici à vingt ans. L'agriculture écologique que nous défendons permettra de stopper et d'inverser l'hémorragie d'exploitations et de main-d'oeuvre agricole et de créer 300.000 emplois en agriculture car il s'agit d'une agriculture qui utilise plus de travail. Mais c'est un travail plus humain, plus centré sur l'écosystème et sa valorisation, moins stressant, un travail de paysan en interraction avec la nature. Cela pose nécessairement la question de la rémunération du travail paysan et de la garantie de prix rémunérateurs, ce qui impose de stopper la libéralisation des marchés agricoles organisée par l'Europe libérale. Nous dénonçons l'illusion du libéralisme vert qui prétend combiner agriculture écologique et libéralisme.
Nous adopterons un plan national visant la réduction progressive de l'utilisation des intrants chimiques pour tous. Nous focaliserons les aides en partie sur les systèmes s'engageant dans la transition écologique (agriculture biologique, réintégration des activités agricoles et d'élevage, culture de fourrages protéiques, etc.).
SOUTIENS
Faut-il aider l'agriculture ? Par quels moyens et à quelles conditions ?
L'agriculture doit être soutenue, mais ce n'est pas une question d' « aide » : il s'agit tout simplement de reconnaître le droit à une juste rémunération du travail dans l'agriculture et d'accompagner les agriculteurs pour qu'ils s'engagent dans une agriculture écologique.
Le Front de Gauche utilisera donc deux outils :
- d'une part, les prix agricoles. Ils doivent rémunérer correctement les agriculteurs dans des conditions moyennes de production. Cela impose de revenir à une protection du marché européen (y compris contre le soja importé), à une régulation des marchés et à une gestion des productions (maintien notamment des quotas laitiers et droits de plantation). Et, comme nous l'avons mentionné, nous imposerons des prix minimaux aux producteurs et un coefficient multiplicateur maximal dans un certain nombre de productions.
- d'autre part, les aides. Elles doivent être recouplées et recentrées en fonction de trois objectifs : la transition écologique de l'agriculture (agriculture biologique, culture de légumineuses, etc.), l'emploi agricole, la solidarité avec les régions les moins favorisées.
COMPÉTITIVITÉ
La course à la compétitivité doit-elle être soutenue ? Quelles mesures serez-vous prêt à prendre dans ce sens ?
Le Front de Gauche dénonce l'objectif de « compétitivité », qui ne répond en aucun cas à l'intérêt général. Aujourd'hui, les grandes exploitations productivistes ne sont « compétitives » (c'est-à-dire capables de produire au plus bas coût de production unitaire) que parce que le volume produit par actif est plus élevé (ce qui compense la faible marge par unité de produit) et parce que les aides de la Pac, au lieu de compenser les inégalités de productivité et de revenus, les accentuent ! Mais cette agriculture productiviste et hyperconcentrée ne produit pas plus de richesses, de valeur ajoutée qu'un tissu dense de petites et moyennes exploitations. C'est même l'inverse, et, de plus, elle est synonyme de dégradation de l'environnement et de destruction d'emplois.
Derrière la défense de la « compétitivité », Nicolas Sarkozy défend en réalité les intérêts d'une minorité d'agrimanagers et de l'agrobusiness. Marine Le Pen se garde bien de remettre en cause ce projet ! Quant à François Hollande, il cache mal derrière le concept de « respect de la diversité des agricultures » un projet d'agriculture duale où, à côté d'une agriculture productiviste alimentant la grande majorité de la population en produits de bas de gamme, une minorité de privilégiés s'approvisionneraient en produits de qualité auprès d'une agriculture de niche.
Le Front de Gauche refuse l'agriculture duale. Il stoppera cette course à la soit-disante « compétitivité » en plafonnant les aides par actif, en les redistribuant aux petites exploitations et en appliquant le principe de surface maximale d'exploitation.
RELOCALISATION
La sécurité alimentaire passe-t-elle par la relocalisation de la production agricole ? Jusqu'où doit-elle aller ?
En France, la relocalisation de la production agricole répond à un impératif écologique, social (maintien des emplois) et d'aménagement du territoire. Dans les pays du Sud, elle répond aussi à un impératif de sécurité alimentaire. Elle comprend deux dimensions :
- d'une part, la relocalisation de la production au plus près des lieux de consommation. A partir du moment où les conditions agronomiques permettent à une région de produire suffisamment pour la population du territoire, c'est à cette échelle que la relocalisation doit être envisagée. Mais il faut garder une certaine souplesse, et la relocalisation est parfois plus pertinente à un niveau géographique supérieur.
- D'autre part, la réintégration des activités de production de protéines fourragères, d'élevage et de production végétale (usage de fumier). Cessons d'un côté d'importer du soja qui détruit les populations paysannes et les forêts de l'Amérique du Sud et, de l'autre, de fabriquer massivement des engrais azotés en émettant des gaz à effet de serre ! On sait en effet parfaitement réintégrer toutes ces fonctions agronomiques ! Cela doit s'envisager au niveau de l'exploitation ou de la petite région agricole.
La relocalisation des productions, conforme à l'idée de souveraineté alimentaire, est fondamentalement contradictoire avec l'idéologie libérale de l'Europe libérale et de l'OMC .
FONCIER
L'usage des terres doit-il être réservé à la production alimentaire, ou faut-il en réserver une part pour les débouchés énergétiques et la préservation de la biodiversité ?
En règle générale, les terres agricoles doivent être réservées aux usages alimentaires, ce qui n'exclut pas l'utilisation de sous-produits à des fins énergétiques. Concernant la biodiversité, les terroirs doivent préserver des espaces non cultivés nécessaires à son maintien.
Le développement des agrocarburants est un véritable scandale, une véritable course en avant pour préserver un mode de production et de consommation qui mène l'Humanité à une impasse, le tout au service des intérêts privés d'une petite minorité, mais dont le poids de lobbying est malheureusement puissant, en France comme ailleurs.
Le bilan énergétique et en matière d'impact sur le changement climatique ne justifient pas, en règle générale, l'usage des agrocarburants. D'autre part, les aides européennes génèrent des importations massives d'agrocarburants en provenance de pays du Sud où leur développement est catastrophique pour les populations paysannes (accaparement de terres) et pour l'environnement (déforestation). Enfin, le détournement des terres agricoles pour la fabrication d'agrocarburants – et quel que soit le lieu de production dans le monde, donc y compris en France – se traduira par une hausse des prix alimentaires aux dépens des populations les plus pauvres.
Le Front de Gauche cessera tout type d'aide (défiscalisation, aides de la Pac) aux agrocarburants et interdira aux entreprises opérant en France toute implication dans la production d'agrocarburants et l'accaparement de terres au travers le monde.
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